Daniel Derderian – SECRETS

Galerie Thomé

Oeuvres

“J’explore la vulnérablité comme une force qui surgit du silence de nos secrets”

Unsatisfied but do not touch me anymore 2020

encre et huile sur toile 55 x 46 cm

Unsatisfied but do not touch me anymore 2020

Insatisfait mais ne me touche plus             

encre et huile sur toile 55 x 46 cm

 

Unsatisfied but do not touch me anymore (Insatisfait mais ne me touche plus) reflète mon combat avec la recherche d’un idéal insaisissable, reflète le monde parfait auquel on s’accroche dans une rêverie enfantine au lieu d’accepter en adulte la condition humaine dans son imperfection, avec les manques, moteurs de désir.

A quel moment s’arrêter dans un processus de création ? Si je continue trop longtemps, je vais dans mes zones d’ombres existentielles. Parfois jusqu’à la destruction de l’œuvre.

J’étais dans l’élan de poursuivre mon ouvrage, mais comme une injonction, le résultat que j’avais sous les yeux m’a incité à poser mes pinceaux. Un exercice d’inachevé pour garder une dynamique vivante et ouverte.

Ma créature surgit dans ses flots bleus liquides. Une vague noire veut la recouvrir et la ramener vers le néant de son inconscient. Arrêt sur image avant le refoulement, Petite victoire dans le combat entre  résistance et prises de conscience.

Dans les rêves l’eau peut exprimer un désir de retour au stade embryonnaire dans le ventre de la mère. Sortir et couper le cordon ombilical est le symbole par excellence qui détermine la frontière entre dépendance et indépendance.

Le sujet ne prend que la moitié de la toile, il y a déjà de la place pour l’autre.

Firebird 2023

feutre fin et huile sur toile 55 x 46 cm

Firebird 2023

L’oiseau de feu

feutre fin et huile sur toile 55 x 46 cm

 

Un profil mi humain mi oiseau, ancré, bien déterminé dans des contours bleu de Prusse. Il s’impose en contraste avec le fond.

Il est en contrôle. Du feu ? De sa liberté ?

L’intérieur du profil est abstrait et intense. Des morceaux d’histoires, de scènes lui passent à travers comme une rêverie passionnelle d’une  beauté sauvage qui ne se ménage pas.

Sous sa couverture de plumes, le sujet assume l’intensité de sa vie intérieure instant par instant.

L’histoire romantique de l’oiseau de feu parle de courage et de cette passion brûlante dont on a besoin pour se libérer de ses fardeaux. Je crée dans cette urgence avec un fort désir de bien-être.

L’oiseau de feu fait aussi référence au phénix qui renaît de ses cendres, il rebondit après un échec et avance plus fort qu’avant.

Flammable 2023

huile sur toile 55 x 46 cm

Flammable 2023

Inflammable

Flammable (Inflammable) est une œuvre sur la dualité de l’intensité, sur lâcher et contrôler le feu qui nous anime. A trop s’approcher d’un feu, on s’y brûle, en gardant la bonne distance on se nourrit de sa chaleur.

Je me suis inspiré d’une photo d’une coiffure qui tenait en l’air comme dans le vide, comme ces images caricaturales de cheveux électrifiés.

Une créature est en flammes. Le feu est symbole de la transformation perpétuelle de la matière, de la métamorphose éternelle, de la naissance et de la mort.

Le feu réchauffe et réconforte aussi, il invite l’âme au repos. Il est le symbole du changement et du renouvellement, la pulsion intense d’un moteur créateur.

Guerrière ? Prêtresse ? Le sujet exprime force, engagement, détermination.

L’image est féminine, symbole de sagesse maternelle. Elle contient  l’intensité par sa démarcation sur le fond noir et protège du danger de vivre trop à vif sa passion et d’y perdre sa raison dans la folie du néant.

Éviter le burnout est un défi actuel sur ce thème.

Volatile thoughts 2023

feutre fin et huile sur toile 55 x 46 cm

Volatile thoughts 2023

Pensées volatiles

feutre fin et huile sur toile 55 x 46 cm

 

Un profil d’une jeune créature oiseau en pleine ébullition dramatique. L’oiseau symbole de liberté, est en mutation et subit un processus de rééquilibrage.

Un sujet naïf, enveloppé dans son noble costume protecteur, exprime déjà sa force et son intensité. Ca lui donne un look rassurant, la couche de plumes comme protection, un costume abstrait.

Il est bien démarqué devant le fond, sa palette de couleurs confirme et intensifie l’arrière-plan.

A l’intérieur du sujet les couches se confondent. On met du temps à découvrir son regard discret et disponible derrière l’enchevêtrement des couleurs. Il accepte l’agitation, ne résiste pas car elle va s’apaiser, s’intégrer pour devenir une force. Le rouge et le noir sont simplement intenses, il n’y a rien de violent. Il accepte la dynamique.

 

Breaking eggshell 2023

huile sur toile 50 x 40 cm

Breaking eggshell 2023

Une coquille d’œuf qui se casse

huile sur toile 50 x 40 cm

 

Une image sur la puissance de la vulnérabilité.

Un regard hésitant, une carapace d’innocence veut s’ébrécher en douceur. Un début d’une mise à nue, des couches de protections qui se déconstruisent vers une libération. Des touches de couleurs mettent en marche une dynamique.

Les accents rouges couleur de la passion prennent le dessus sur les accents bleus plus discrets de la raison et quelques marques noires font appel à l’inconscient.

La dynamique attendrissante d’un poussin qui sort de l’œuf, fragile, vulnérable avec l’excitation et l’étonnement du nouveau monde qui se présente.

Dans le regard du sujet traîne de la résistance, une brindille d’incertitude, confus avant de quitter sa carapace et accepter sa vulnérabilité comme une force.

White powder 2021

huile sur toile 55 x 46 cm

White powder 2021

Poudre blanche

huile sur toile 55 x 46 cm

Mon travail sur du lin a démarré après avoir vu ces œuvres splendides sur lin de Toulouse-Lautrec au musée Beaubourg. Comme couleur de fond le lin est vivant et donne une impression de terre ou de peau qui enveloppe le sujet.

J’ai créé une image intemporelle de noblesse, de décadence, d’excitation, de confusion, de fatalité, des interrogations nostalgiques sur nos ancêtres et la vraisemblance d’un héritage culturel, des interrogations sur mon propre passé turbulent.

L’image est austère dans sa conception sur le fond de lin brut. Beaucoup de blanc couvre du noir, il y a juste quelques touches de nuances sensuelles.

Un image effacée, couverte, qui aspire vers le songe, une réalité intensifiée, confusions d’identités et de repères de lieu et de temps.

Un fantôme de comtes et comtesses des romans de Proust ? Ou encore plus ancien ? White powder (poudre blanche) pourrait faire référence au temps où on se mettait de la poudre blanche sur le visage.

Dans La Poudre et le Fard, Une histoire des cosmétiques de la renaissance aux lumières, Catherine Lanoë écrit : « dès le XVIe et jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, la quête de la blancheur s’impose en France à la manière d’une véritable tyrannie, car l’albâtre de la peau constitue le fondement même de la beauté, son origine et son principe. […] Par leur blancheur, les aristocrates entendent se distinguer des ordres subalternes voués à offrir leur visage au soleil et aux intempéries, susceptibles d’altérer leur carnation.»

Si on parle de nos jours de ‘poudre blanche’ on parle d’autres substances d’excitations.

Just lipstick 2020

crayon, encre et huile sur toile 55 x 46 cm

Just lipstick 2020

Juste du rouge à lèvres

crayon, encre et huile sur toile 55 x 46 cm

 

Pendant le premier confinement, je peignais des portraits individuels de membres d’une famille imaginaire que j’ai appelé

 ‘La famille de Rick’ inspiré par l’univers du couturier Rick Owen.

Derrière la douce façade d’un gentil clown, j’imaginais le personnage de Just lipstick comme le fils fataliste en relation avec le père coupé de ses émotions dans Heaven is in my head. En manque de structure et de contenu, c’est un être blanchâtre et irréel qui vit dans son château de rêves ou dans ses effluves d’opium. Il flotte dans sa vie avec une élégance fantomatique. Il est plein d’effacements, en manque d’égo, jeune prince enfariné, il vit la vie comme une blague. De ses lèvres abondamment maquillées ne sort plus aucun mot.

Ça pourrait autant être un personnage insouciant qui vit dans le moment présent avec une certaine fatalité, profitant de la vie, le temps que ça dure.

Oui, tout est vanité, tout est mensonge en dehors de ce ciel sans limites. Il n’y a rien, absolument rien d’autre que cela… Peut-être même est-ce un leurre, peut-être n’y a-t-il rien, à part le silence, le repos.Léon Tolstoï dans La Guerre et la paix.

 

Radiologique 2023

encre, huile et élément radiographie cousu sur toile 55 x 46 cm

Radiologique 2023

Radiologique

encre, huile et élément radiographie cousu sur toile 55 x 46 cm

 

Retour à la radiographie, source de ma démarche artistique et mon désir de transparence.

Je travaillais probablement avec des radiographies, des images objectives de l’intérieur d’un être humain, par confusion et peur de mes propres sentiments.

J’explorais mon environnement en composant des mises en scènes de mes ancêtres, de mes influences culturelles et de mon quotidien avec des bouts d’images objectives d’un être humain.

J’ai voulu recréer une transparence au sens propre, un élan naïf de vouloir dénoncer le passé.

Ma créature bleue dégage autorité et sens de l’objectivité. J’associais l’étrangeté des images de l’intérieur d’un corps au images mystérieuses du cosmos.

Comme un ange avatar, porteur de nos secrets, il flotte dans l’univers, gardien de l’inconnu, de nos mystères. Il est détaché des sentiments.

En physique nous ne sommes que poussières qui font partie de plein de secrets et d’inconnus.

Pour des raisons écologiques, les radiographies n’existent plus, les images naviguent dans le virtuel. Tout le monde a des applications, des profils, des avatars et plein de mots de passe, secrets.

Little smile 2023

feutre fin, encre et huile sur toile 50 x 40 cm

Little smile 2023

Petit sourire

feutre fin, encre et huile sur toile 50 x 40 cm

J’ai créé Little smile (petit sourire) à la suite de Authority (autorité), un portrait qui, sans le vouloir, était devenu un petit monstre comique, une caricature clichée d’autorité, le père, le prêtre, le professeur, le médecin. Ma rébellion d’adolescent paumé en quête d’amour contre l’autorité.

Pour me déculpabiliser j’ai fait aussitôt après Little smile comme contre pendant.

Je voulais une image douce, rassurante, avec une autorité naturelle et accueillante, le père idéalisé d’un trop vieil enfant qui veut être aimé.

Si dans tout ce processus j’étais à fond dans la régression c’est parce que je me suis inspiré de l’image réelle de mon psychanalyste, il est d’une beauté troublante. Après m’être égaré complètement dans ma résistance cynique, j’ai cédé à mon transfert amoureux.

Le jeune homme, le sourire en coin, observe, amusé, notre combat avec nos contradictions. En simple miroir, il nous invite à une réconciliation avec nous-mêmes, avec notre amour propre.

 

Virgin wood 2024

feutre fin, encre et huile sur bois 70 x 50 cm

Virgin wood 2024

Bois vierge

feutre fin, encre et huile sur bois 70 x 50 cm

 

Je me suis inspiré d’une ancienne photo en noir et blanc dédicacée, d’une grande danseuse étoile, Yvette Chauviré.

La danse classique a apprivoisé l’animal en moi. A l’autre bout de cette technique exigeante il y a la virtuosité, le vertige du mouvement. Relâcher l’animal dans un cadre très strict est le défi de toute étoile. Je voulais explorer la nature humaine derrière l’image d’un symbole culturel.

Dans la démarche et l’expérimentation avec le support, j’ai fait le clash d’un bel artifice historique et académique avec le brut naturel et organique du bois.

J’ai cherché à donner forme à une image féminine forte et élégante. Ancré, posé, mon sujet dégage confiance et dignité.

Son visage encore plus blanc que le clair de son support de bois vierge auquel elle est connectée par le haut de son buste donne de l’autorité et une dignité naturelle.

Le fond jaune soulève la dynamique de son caractère rayonnant. Elle est portée.

Mope 2020

huile sur toile 55 x 46 cm

Mope 2020

Mope

huile sur toile 55 x 46 cm

 

Mope a été réalisé pendant le premier confinement. Au hasard d’une promenade antérieure, j’avais découvert un livre de photos sur l’œuvre du créateur de mode Rick Owen. Il réalise des vêtements qui changent la structure du corps. Il les fait porter par des modèles atypiques qui suggèrent des personnalités fortes. Ce monde étrange, onirique, plus large que la réalité, a nourri ma fantaisie.

A partir de ces images je me suis fabriqué, pendant l’isolement du premier confinement, une famille imaginaire d’environ vingt portraits que j’ai appelé « La famille de Rick ». J’ai voulu rendre hommage à la vulnérabilité, à la singularité.

En anglais ‘to mope’ (=désapprouver) évoque la rébellion. Mope est pour moi la beauté d’une maladresse généreuse, un grand cœur dans des airs de gros durs. L’expression familière ‘en prendre plein la gueule’ est figurée dans ce tableau par les bleus. Le bleu est aussi la couleur du pouvoir. Mope résiste patiemment et accueille le futur, résolument.

Heaven is in my head 2020

huile sur toile 55 x 46 cm

Heaven is in my head 2020

Le paradis est dans ma tête

huile sur toile 55 x 46 cm

Pendant le premier confinement, je peignais des portraits individuels de membres d’une famille imaginaire que j’ai appelé

‘La famille de Rick’ inspiré par l’univers du couturier Rick Owen.

Dans cette famille, Heaven is in my head, est l’image d’un père absent.

Il est ailleurs, coupé de sa possibilité de communiquer, enfermé dans son cauchemar, un monde archaïque ou il n’y a pas de place pour des émotions nuancés.

Je suis parti d’une image de prisonniers dans leurs tenues.

Le personnage est en lambeaux. Il voudrait se libérer de son costume et reconstruire un visage, une peau, un filtre, une protection.

Je voulais que ce soit une image dans laquelle on puisse projeter son désespoir pour s’en libérer, l’accrocher au mur en pleine vue, pour s’en débarrasser. Un repère extérieur qui crée une dynamique de guérison, de mieux-être.

White forest 2024

feutre fin, encre et huile sur bois 70 x 50 cm

 White forest 2024

Forest blanche

feutre fin, encre et huile sur bois de bouleau 70 x 50 cm

 

Le travail sur bois ouvre sur des nouvelles possibilités artisanales d’explorer les limites d’un support. La matière est solide, rigide, on peut tailler dedans, la transpercer, la brûler, la trouer. Un repère et une inspiration rassurante pour explorer quelque chose de plus viscéral et pulsionnel ainsi que les confusions, les contradictions et les résistances à rencontrer en cours de route.

Le nom White Forest (Forest blanche) est inspiré par l’excitation de nouvelles possibilités qui se présentent.

Un bel homme des bois nous transperce de son regard. La position sophistiquée de son bras, de son poignet et de sa main l’expose dans le cadre blanc et sur le support. Il se présente dans une fenêtre. Une grande ouverture blanche à hauteur de son crâne suggère son ouverture d’esprit.

Animalier et sorcier, il interroge celui qui le regarde : ou sont vos limites, comment gérez-vous l’animal en vous et vos pulsions ?

Envoûtant, il invite à une danse tribale de séduction et s’ amuse à regarder l’ effet miroir qu’ il a sur l’ autre.

New bride 2023

feutre fin, encre et huile sur toile 60 x 50 cm

New bride 2023

Nouvelle mariée

feutre fin, encre et huile sur toile 60 x 50 cm

 

New bride est une œuvre sur la possibilité de recommencement à tout âge. Une expression d’espoir réaliste. Faire avec.

Garder une dynamique dans l’évolution de la vie en intégrant le passé et si un peu de bonheur se présente on peut laisser un peu de souffrance derrière soi.

En lâchant, en intégrant le passé, on efface, on revient à l’instant, on fait table rase. Il n’est jamais trop tard pour recommencer.

Une dame avec une certaine maturité, est couverte d’un voile blanc. Sa pose est digne et disponible, on voit les marques du passé derrière.

Ses contours solides restent bien visibles, je les ai adoucis, comme un début d’effacement.

Avec la maturité on espère rencontrer des pastels et vivre l’intensité dans les nuances. Les sentiments s’élargissent.

L’instant devient de plus en plus naturellement concret et palpable. On se projette moins, on agit, on abandonne la résistance sur ce qui adviendra.

Blue hour 2023

feutre fin, feutre couleur et huile sur toile 50 x 40 cm

Blue hour 2023

L’heure bleu

feutre fin, feutre couleur et huile sur toile 50 x 40 cm

 

Un être en transformation entre le jour et la nuit.

Je suis parti de la photographie d’un jeune homme au visage limpide et franc avec un port de tête raffiné et élancé. Je l’ai surexposé, livide dans la confusion entre deux lumières. Un passage de la vie sociale à l’intimité.

Il laisse derrière lui un ciel clair de fin d’après-midi, devant lui tombe la nuit. Il passe à travers l’heure bleue, le changement de jour en nuit.

Le moment pour se poser et changer de rythme ; de la lumière à l’obscurité, de l’extérieur à l’intérieur, de l’exposition au refuge et peut-être de l’excitation au blues.

Le dernier moment du couché et le premier moment du lever du soleil est appelé l’heure dorée ou l’heure magique.

J’aime travailler avec ces couleurs opposées qui font référence au dynamiques oniriques du soleil et de la lune.

One night only 2023

feutre fin, feutre couleur et huile sur toile 46 x 55 cm

One night only 2023

Seulement une nuit

feutre fin, feutre couleur et huile sur toile 46 x 55 cm

 

Je suis parti de la photographie d’un port de tête qui me paraissait abandonné et en répit. Elle savoure intensément l’instant de partage, sensuelle et fataliste, s’interrogeant sur sa liberté et son indépendance.

J’ai développé autour de l’élan nostalgique de ce port de tête surexposé des tons de nuit, entre paix et excitation, entre solitude et partage avec l’autre.

Une créature élégante se présente avec grâce au regard du public ; invitation à une relation courtoise. Son comportement intense est mesuré, elle veut rester en contrôle des limites, jeu d’attraction et de retenue.

One night only (Seulement une nuit) réfère à une fatalité de solitude, une urgence, une peur et maladresse de s’engager dans une relation durable, avec le cri du contraire dans le non-dit.

En commençant avec une nuit, chaque nuit pourrait être une nouvelle première avec la même personne.

La dualité complexe de beaucoup de gens entre dépendance et autonomie.

Hand stick 2024

crayon, feutre fin, encre, huile et cire sur bois de bouleau 120 x 80 cm

Hand stick 2024

Bâton de main 

crayon, feutre fin, encre, huile et ciresur bois de bouleau 120 x 80 cm

 

A partir d’une photo d’un homme en contre lumière en pleine nature avec une pose sophistiquée, j’avais une grande liberté pour composer mon image.

La sensation de travailler sur le bois, m’apaise, comme si c’est un fond vivant avec lequel je dialogue, illusion étrange d’artiste de sociabiliser. J’approfondis de plus en plus les relations entre mes sujets et leur entourage.

Le personnage est placé dans plusieurs cadres : un cadre en or, un cadre fin en traits  colorés et un troisième par le bois ciré du support.

Le personnage regarde au-delà de ses cadres et semble analyser son environnement. Le bleu, symbole de la raison, domine la tête, il fait des choix, se positionne. Il est fort, délicat, sophistiqué et évalue la crédibilité de l’ autre. Le résultat me rappelle la chanson humoristique de Boris Vian « Je suis snob »

Au milieu du corps on voit le support blanc. Une main noire flotte au milieu, image de l’artisanat de l’expression créative, une belle béquille pour gérer l’intensité et l’imperfection de la vie.

Avec une certaine détermination, le sujet semble communiquer : « Me voilà ! », simplement comme je suis.

 

Dans plusieurs œuvres une ligne, un filet, sort de la bouche. Des détails d’images qui expriment le désir de sortir le non-dit ?

Ici une fine ligne blanche sort de son œil. Un message plus profond qui vient directement de l’âme ? L’idée m’est venu d’une fresque publique de Michael Borremans, qu’il a offert à la ville de Gand. L’œuvre s’intitule “Maagd” (Vierge). Deux rayons blancs sortent de ses yeux, une énergie puissante et abstraite.

Exit 2021

feutre fin et huile sur toile 100 x 70 cm

Exit 2021

La sortie

feutre fin et huile sur toile 100 x 70 cm

 

J’ai voulu travailler sur du lin, probablement après avoir vu ces œuvres splendides sur lin de Toulouse-Lautrec au musée Beaubourg. Comme couleur de fond le lin est vivant, donne une impression de terre ou de peau qui enveloppe le sujet.

Ici le personnage est un peintre qui tient un boulet dans sa main à la place du pinceau. Il y a parfois du combat dans l’acte de peindre. Les jets de peinture verticales entaillés au couteau peuvent donner l’impression d’une bougie qui fond et coule sur un chandelier. Le passage du temps et la violence retenue sont sublimés dans un schéma simple et paisible. Toute l’énergie est concentrée dans les mains qui peuvent faire exploser le boulet, tout détruire. Cette peinture est une autobiographie picturale qui dépeint les sentiments ambivalents de plaisir et de frustration lors de la création. Le boulet est là pour être lancé, une évacuation libératrice.

 

Moonlight Serenade 2020

feutre fin et huile sur toile 55 x 46 cm

Moonlight Serenade  2020 

Sérénade au clair de lune

feutre fin et huile sur toile 55 x 46 cm

 

 Moonlight Serenade et Limited Sensations ont le même profil d’un jeune homme. Une image qui m’inspire à donner des formes à ma mélancolie, à des mémoires confuses du tourbillon de l’adolescence. L’adulte cherche des sensations fortes.

L’heure bleu est la mort du jour et la naissance de la nuit, une lumière sur l’obscurité d’un homme errant dans ses fantasmes, ses désirs et ses peurs existentielles, épuisé par son port de tête noble, trop lourd à porter et inquiet à l’idée de devenir un homme-loup qui chante ses pulsions.

Le bleu me donne une sensation de pouvoir, de maitrise, de contrôler les tensions. Entre sauvage et élégance, tourment et nostalgie d’un romantisme éperdu, j’ai composé une image de beauté tragique pour ce jeune homme rêveur au visage gracile qui pourrait s’être échappé d’un roman de Marcel Proust.

Oscillation 2022

huile sur toile 55 x 46 cm

Oscillation 2022 

Oscillation

huile sur toile 55 x 46 cm

Oscillation fait partie d’une série d’œuvres récentes sur les sens. J’ai voulu donner une image à des vibrations. Le sujet est bien ancré et il prend vie par la suggestion d’un mouvement qui passe de la droite vers la gauche. Un coup de vent ? Des sonorités qui le font vibrer, des idées, des mémoires qu’il gère sur leur passage ?

Avec des pirouettes improbables comme ornementations, je voulais emmener ma figure dans un monde de rêves intemporel et le mettre dans un cocon protecteur de sensations pures.

Le mauve, le vieux rose sont des gammes de couleurs que j’associe avec le noble, la délicatesse, le spirituel, le mystère. L’image est une incitation au progrès, a la modernité vis-à-vis d’un ancien régime. Le personnage pourrait être un Punk de la fin du Moyen Age.

J’ai prudemment exploré une relation entre le fond et le sujet.

Daniel Derderian 2023

© photo Philippe Merchiers

démarche artistique

Avec une tendre colère, Daniel Derderian est en quête de cohérence entre l’image sociale et la sensation particulière d’être un individu, il crée des dynamiques entre la surface et le fond.
En déconstruisant des images formatées et idéalisées, il explore les torsions de l’âme, la force et la vulnérabilité que nous portons en nous par nos secrets.

Il compose des portraits inachevés pour préserver une dynamique ouverte (intrinsèque à l’œuvre). Par une mise en lumière de nos particularités, de notre étrangeté, il crée un monde de diversité, coloré, excitant.
Ses sujets se présentent dans leur intimité, comme des créatures hybrides dans un monde situé entre le rêve et la réalité.

Daniel Derderian puise ses modèles dans l’univers séducteur et artificiel de la mode.
Les peintres contemporains qui l’inspirent, seraient Egon Schiele pour la forme et la tension des corps et Francis Bacon pour la torsion et déformation de la réalité, Par son vécu aux Pays Bas, ses références classiques seraient Rembrandt, pour son obscurité lumineuse et certains Primitifs Flamands, pour leur étrangeté mystique.

Daniel Derderian travaille dans l’urgence, tiraillé entre le frein pudique d’un adulte et la fantaisie illimitée d’un enfant sauvage.
Il met d’abord en place un repère solide avec le crayon, le feutre, le pinceau. Il continue avec le couteau, le chiffon, le doigt, du white spirit pour obtenir de la décoration ou de l’effacement, parfois jusqu’à la destruction. Entre paraître et être, confus entre différentes réalités, il explore les frontières entre figuration et abstraction.

Après la réalisation, il décrit son œuvre à une autre personne, son ‘porte-parole’, qui lui donne un nom en Anglais. Un processus de distanciation et une première interprétation.
Daniel Derderian cherche une connexion simple, une dynamique, une libération, l’émergence de petites histoires qui sortent du non-dit. Chaque œuvre est encadrée de la même façon, à la manière d’un corset.

Daniel Derderian 1983

© photo Het Nationaal Ballet

 biographie

Daniel Derderian vit et travaille entre Montreuil (Paris) et Gand en Belgique. Il est né à Marseille en 1962, de parents d’origine Arménienne. Il est de la troisième génération après le génocide.

A onze ans, pour éviter une explosion intérieure due à des choses de la vie qu’il ne peut comprendre, il sort dans la rue avec un petit couteau de table dans la main en criant sa fureur de ne pas trouver sa place dans le monde. Un psy lui conseille un hobby, il prend des cours de danse classique. La danse, le cinéma, la lecture, l’art et la créativité deviennent ses moteurs de survie. Il se cultive en faisant l’école buissonnière.

A quinze ans et demi il obtient son premier contrat de danseur classique et complète sa formation au Centre de Danse International Rosella Hightower à Cannes.

Adolescent, il se maquille les yeux et porte des vêtements qui font retourner le regard des gens sur son passage. Cette provocation l’excite. Ça lui plaît de renvoyer l’autre à ses propres normes.

Professionnellement, il continue à fonctionner principalement sur la séduction de son apparence. Il commence à 17 ans en tant que danseur classique au Ballet National de Marseille Roland Petit, puis au Het Nationaal Ballet d’Amsterdam. Il travaille ensuite dans le monde pailleté du show-business et prend des cours de théâtre avec Vera Goreva du théâtre d’Art de Moscou Stanislavsky.

En 1995, il monte avec son copain de vie Flamand la compagnie de théâtre Viande. (étym. Vivenda : ce qui sert à la vie) et fait l’écriture et la réalisation de trois créations. Il présente un univers où réalité et illusion font des va et vient permanents. Les coulisses sont supprimées.

En 2008, il abandonne la scène et commence son travail de plasticien.

Ses premières œuvres sont des collages à base de radiographies – un matériel clinique qui montre objectivement l’intérieur d’un corps. Il explore ses origines, ses influences culturelles et son quotidien. Il met ses œuvres dans un caddie, entre dans une galerie à Marseille qui les expose en solo la même année.

L’année d’après, il crée une collection d’objets-sculptures, des totems urbains qu’il expose dans la même galerie. Il détruira, plus tard, une grande partie de cette œuvre.

En 2015, Daniel Derderian passe au dessin et aux techniques mixtes sur des grandes feuilles de papier. Il crée ses premiers portraits hybrides, des compositions par couches, du squelette jusqu’à la peau. L’année d’après, il transpose le même processus avec de l’acrylique sur des toiles et laisse ses sujets isolés sur un fond vierge.

En 2019, il se sent prêt pour passer à la peinture à l’huile et ajoute des fonds. Aujourd’hui, la plus grande partie de son œuvre est constituée de portraits. Son approche reste pulsionnelle et sa productivité compulsive lui a permis de réaliser plus de mille toiles et dessins.

Il est à ce jour artiste résidant à la Galerie Thomé à Paris et à la galerie Nobody&Friends à Anvers en Belgique.

Il est membre de La Condamine et du collectif DF Art Project qui met en lumière le Destructuralisme Figuratif.

Daniel Derderian 2022

© photo Philippe Merchiers